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Gitte Haenen, athlète paralympique, médaille d'argent et de bronze lors des derniers Championnats du Monde, donne son avis sur la place des femmes dans le sport.

Penses-tu que tu as eu les mêmes opportunités que les hommes ?

Dans le sport paralympique, j'ai l'impression d'avoir les mêmes opportunités que les hommes au même niveau. J'avais moins ce sentiment dans ma carrière sportive en tant qu'athlète valide. D'après moi, cette différence vient du fait que ma carrière sportive précédente était dans un monde plus "masculin". Je pense qu'il y a plus d'égalité dans le monde paralympique, tout autant de respect et d'attention pour les athlètes féminines.

Les femmes sont-elles aussi fortes mentalement que les hommes ?

Je pense que c'est plus lié à la personnalité qu'au sexe. Je connais beaucoup de femmes qui sont mentalement très fortes, mais aussi d’autres qui le sont moins. Il en va de même pour les hommes.

D'après mon expérience, la force mentale dépend en partie de ce que vous avez déjà vécu dans votre vie et de la façon dont vous réagissez face aux échecs et aux succès, comment vous traitez les choses, lâchez prise, trouvez une nouvelle énergie et passez à autre chose. Ça dépend aussi des gens qui vous entourent et vous aident.

Un échec ne signifie pas que votre prochain essai entraînera un autre échec, tout comme le succès n'est pas un précurseur d'un succès durable. Des choses imprévisibles peuvent toujours se produire sur votre chemin, ce qui rend le suivi de votre plan initial plus difficile, voire impossible, ou au mieux, tout se passe plus facilement. Avoir de bons conseils est important pour avoir une force mentale. Il ne faut pas toujours présumer du pire ou du meilleur, mais commencer avec une intention positive, indépendamment de ces choses imprévisibles, et toujours faire de son mieux pour atteindre l'objectif fixé.

Les athlètes féminines de haut niveau reçoivent-elles la même reconnaissance / respect que les hommes ?

Les athlètes féminines de haut niveau sont respectées, mais la reconnaissance qu'elles reçoivent est bien moindre que celle que reçoivent les athlètes masculins. Par exemple, dans de nombreux sports, pour la même discipline et au même niveau, le prize money est plus faible pour les femmes que pour les hommes. Je ne comprends pas très bien ça parce que ce sont les mêmes efforts et les mêmes heures d'entraînement. Et puis, les émissions sportives à la télévision et les journaux consacrent plus de temps aux sports masculins et très peu aux sports féminins.

Est-ce positif pour une athlète féminine d'avoir des femmes dans son encadrement ?

Je pense que oui. Il y a parfois des choses qui sont aussi importantes pour l'entraînement pour lesquelles on parle plus facilement avec une femme qu'avec un homme. L'encadrement direct que j'ai autour de moi est composé principalement de femmes. Je pense que c'est plutôt un cas unique. Je suis très satisfaite de cet encadrement, et il y a également un bon équilibre avec les hommes.

Quelles actions concrètes tu aimerais voir pour donner les mêmes chances aux femmes dans le sport ?

Plus de couverture, de suivi et de visibilité des compétitions et prestations sportives des femmes dans les médias. L'égalité des revenus et des prize money entre hommes et femmes. Des activités sportives où les filles et les jeunes peuvent mieux s'orienter vers les différents sports. Et enfin, des moments où il y a une attention et une discussion ouvertes sur la nécessité et l'importance de l'égalité dans, entre autres, le secteur du sport.

De quelle manière ta carrière sportive t'a-t-elle renforcé en tant que femme, en tant que personne ?

Le sport a toujours été très important dans ma vie. Ça m'épanouit, à la fois physiquement et mentalement, crée un réseau social, de bonnes amitiés, des défis. J'apprends à me connaître et je repousse mes limites. Le sport me donne plus de confiance en moi, de structure, me fait me sentir vivante et me fait vivre beaucoup de choses.

Enfant, j'ai appris à me défendre et à défendre les autres grâce au sport, à travailler ensemble, à respecter les autres et bien plus encore. Avec les carrières sportives que j'ai déjà eues, j'ai toujours eu quelque chose à quoi m'accrocher dans la vie et j'ai pu mieux gérer et faire face aux moments difficiles. Le sport m'a appris à persévérer et à continuer à croire aux possibilités, non seulement dans le sport lui-même, mais aussi dans les périodes moins colorées et difficiles de ma vie. Typiquement, comme les années de complications médicales avant mon amputation, réapprendre à marcher et puis les hauts et les bas après mon amputation.

Quel est le meilleur souvenir de ta carrière?

En juillet 2017, un an après mon amputation, je fais la 4e place du 100m des Championnats du monde à Londres. Beaucoup de gens m'ont dit que c'était vraiment dommage d'avoir manqué le podium. Mais moi, j'étais très contente de cette 4e place. C'était le début d'une nouvelle carrière sportive, et c'était un résultat auquel je ne m'attendais pas si tôt après mon amputation.

Deux ans plus tard, aux Championnats du monde de Dubaï 2019, j'ai pris la médaille de bronze sur 100m et l'argent au saut en longueur. Et j'ai fait ces résultats malgré le fait que 2019 a été une année difficile pour moi, à la fois mentalement et physiquement. On m'a diagnostiqué la maladie de Bechterew, j'ai eu deux fractures à la cheville et mon père est décédé.

Avant qu'il ne parte, j'ai promis à mon père de continuer à faire de mon mieux pour obtenir d'excellents résultats aux Championnats du Monde. Réaliser cette promesse avec le soutien de mon équipe, ça m'a soulagé. Je suis satisfaite d'avoir pu livrer ces prestations et je sais que mon père aurait été fier.